Michel Toutous voit onduler la musique bretonne depuis 45 ans

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Michel Toutous a plus d'une corde à son violon d'Ingres : biniou, bombarde, flûte, guitare... Et un regard lucide sur la musique bretonne dont il est un des critiques dans la revue Ar Men.

Témoin privilégié de la musique bretonne depuis les années 70, Michel Toutous a le recul nécessaire pour se féliciter des époques épiques et se faire une raison des périodes tièdes.

« Né dans un milieu sans musique, mon goût pour elle est venu comme une révélation, par les pieds, en dansant dans les festoù-noz, du côté de Chateauneuf-du-Faou ». Michel commence alors à vouloir imiter ceux qui sont sur l’estrade, à gratouiller, puis à tâter du biniou « à l’oreille », comme beaucoup alors, puis de la bombarde au lycée, avec un pion.
« Ça a commencé vers 1972, en même temps que Stivell à l’Olympia. C’était dingue, ça germait de partout. Beaucoup de couples de sonneurs, chanteurs…  » Dès 74, il se lance avec son pote d’enfance Yann Le Meur dans les festoù-noz, tous les samedis, partout en Bretagne. L’occasion de faire des rencontres, d’abord gallèses, avec le groupe mythique La Mirlitantouille, puis plus jazzy avec Michel Aumont, enfin plus trad avec BF15 qui laisse une trace pérenne dans la mémoire bretonne.
Viennent les années 80 et un creux de vague que Michel estime profitable :  » Y avait une telle profusion que ça a épuré la scène de… quelques groupes de merde, il faut avouer.  » C’est dans ce ventre mou des eighties qu’ont germé de grands groupes, apportant un air frais : Kornog, Gwerz (avec Erik Marchand, les frères Mollard, Soïg Siberil…), Pennoù Skoulm (littéralement : les Têtes de nœud, avec Ronan Le Bars, Christian Lemaître, Jean-Michel Veillon…), Skolvan, BF 15… Sans compter le pur chanteur que fut Yann-Fanch Quemener.
Ce creux a généré une nouvelle vague au milieu des années 90, plus débridée, plus rock n’roll, surtout avec Ar Re Yaouank des frères Guichen, belle rafale rafraîchissante « qui a filé un coup de vieux aux autres groupes… » Une ferveur entretenue par des noms comme Startijenn, David Pasquet Group, Denez, Plantec, puis Hiks et autres Ramoneurs de menhirs qui mêlent les genres et libèrent les danseurs, plus jeunes, aux pas plus enlevés…
C’est pourquoi, depuis son appartement surplombant le centre de Saint-Brieuc, Michel regarde le creux actuel comme le creuset de talents imminents, parmi lesquels il cite Fleuves
aux sonorités plus électroniques ; nom auquel on peut ajouter War-Sav, Sparfell ou Triskill au style résolument échevelé et métal.
Attention, plus le creux est profond, plus ça risque de déferler braz !