Il y a près d’un siècle : Le comte, la chanteuse, le docteur et le pistolet

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Près du départ de la balade ci-contre se trouve le château de Kerninon. Le dernier comte de ce nom a succombé en 1924 à une mort violente. L’enquête a connu des rebondissements jusque dans les pages du Canard Enchaîné.

Selon la tournure d’esprit de chacun, l’histoire relèvera du conte de fée… ou du polar de série B. Le riche comte Roger de Kerninon, en service militaire fin XIXe, croise Louise Théolas, alias Loulou, chanteuse de cabaret à Constantine. En dépit du scandale, le mariage est prononcé. L’artiste légère devient Mme la comtesse de Kerninon.
Tyrannique et enivrée de son nouveau statut, la parvenue dépense sans compter. « Un jour aux courses, l’autre au casino, » résume Jean Even, l’ancien maire de Ploulec’h qui a écrit sur le sujet*. La ruine est rapide et, en 1923, la vente du château inévitable. Le couple s’installe dans un appartement du fils de Louise, devenu notaire rue Savidan, à Lannion.
C’est là, en 1924, que des coups de feu sont tirés. Le comte est touché à la tête. Après avoir plombé les comptes, l’ex-artiste légère a-t-elle plombé son comte ?
Dans un premier temps, elle plaide l’accident et n’est pas inquiétée. De plus, elle semble bénéficier de l’indulgence du Dr Aurégan, ami de la famille, qui déclare le comte «mort d’un œdème pulmonaire. » La comtesse, défendue par un ténor du barreau, est disculpée, l’enquête et le mari enterrés.
Mais une certaine Bernardine Nedellec, maîtresse du comte, révèle à Ouest-Eclair que le mourant lui aurait confirmé la culpabilité de sa femme mais que le Docteur Aurégan, lui aurait intimé de n’en rien dire, «qu’il intercéderait auprès de la famille pour une compensation financière. » Un docteur au chevet de la respectabilité, plutôt que de la vérité ?

Suite au scandale, le corps est exhumé et autopsié sous le porche même de l’église «avec juste un drap pour paravent. » La culpabilité de la femme sera établie, elle écopera de huit ans de prison, n’en fera que trois et finira ses jours à Nice «…à deux pas d’un casino. » On ne se refait pas.

(*) L’affaire de Kerninon, de Jean Even, éd. À l’ombre des mots. Disponible à la Boulangerie du rond-point de Ploulec’h